de Genevayse

de Genevayse Cane Corso

Cane Corso

Ethymologie du nom Cane Corso

Ethymologie du nom Cane Corso

. Tout d’abord commençons par le mot cane qui en italien veut tout simplement dire chien au singulier, sans aucune autre connotation, ensuite parlons de l’attribut corso, c’est cet adjectif attribut qui, aujourd’hui encore suscite tant de désaccords quand à son étymologie, au point de lui consacrer un plein chapitre. Nous allons tenter de l’expliquer, tout en ne perdant pas vue qu’il s’agit bien là de suppositions. Nous développerons toutes les théories des grands spécialistes de la race, mais surtout celles qui nous paraissaient les plus cohérentes et les plus intéressantes en tentant bien évidement d’apporter également notre petite contribution à la tâche. Vous verrez elles démarrent toutes différemment pour se terminer curieusement toutes, par la même implacable conclusion

Parlons de la première théorie, celle du professeur Giovanni Bonatti, qui fut officiellement le premier scientifique à signaler la présence de ce chien molossoïde dans le Mezzogiorno (midi italien), ce fut également le premier à solliciter la récupération cette race. Pour lui l’attribut corso dériverait, de l’ancien adjectif provençale corsus qui dans de nombreux dialectes des Pouilles, signifie robuste (adjectif qui n’est plus trop utilisé de nos jours). Si l’on parle de Provence, on ne peut pas exclure que cette région des Pouilles a longtemps été tour à tour dominée, envahie, colonisée par de nombreux français, à commencer par les Normands (de 1071 à 1229), puis les Angevins (de 1266 à 1480), les Bourbons mêmes si ces derniers nous viennent d'Espagne, ils sont les descendants directs des Bourbons Capétiens, donc français (de 1738 à 1860, compris la parenthèse Napoléonienne qui eu lieu de 1805 à 1815, sous le gouvernement de Murat). C’est pour cela que cette région des Pouilles, garde un lien très particulier avec la France car son histoire est intimement liée à celle-ci.

Cette colonie franco-provençale se serait formée entre le 12ème et 14ème siècle, une première théorie notamment soutenue par Michele Mellilo,
dans Donde e quando vennero i francoprovenzali in Capitanata, I quaderni della regione, 1974, p. 80 à 95, avancerait que la présence de cette colonie serait étroitement liée à la conquête angevine mené par Charles Ier d’Anjou qui voulut assoir sa suprématie peu de temps après la bataille du Bénévent qui eut lieu en 1266, en encourageant dans deux ordonnances publiées le 8 juillet 1268 et le 20 octobre 1274, de nombreux fidèles à la couronne angevine à migrer dans le Mezzogiorno, afin de revitaliser la région mais aussi et surtout pour un soutien militaire temporaire au fort de Crepacore (non loin de Celle et de San Vito). Une partie des troupes se retira après la conquête mais une autre resta dans cette région des Pouilles. Cette théorie fût balayée par Nando Romano, dans La raccolta dei materiali nelle aree romanze esogene di Puglia, Procaccini, 1972, p. 49 à 58, en demontrant que ces angevins de Lucera étaient en réalité des bourguignons.

Une autre théorie que nous jugeons toute aussi plausible, s’est échafaudée sur la base d’une phrase écrite par Pierre Gilles, dans
Histoire ecclésiastique des églises reformées recueillies en quelques vallées de Piedmont, autrefois appelées Vaudoises, Paris, 1643, p.19, … Les Vaudois de Provence étants persécutés à l’instance du Pape séant en Avignon… allèrent vers la ville de Naples et avec le temps édifièrent 5 villages : Monlione, Montauato, Faeto, la Celle et la Motta…

Une étude phonologique datant de 1978, établie par Ernest Schüle, nous fait part que ces dialectes franco-provençaux parlés dans les communes de Faeto et Celle, proviendraient de souches dialectales de deux départements français : l’Ain et l’Isère.

Rappelons aux lecteurs que seules les villes de Faeto et Celle (près de la ville de Foggia), ont conservés leurs dialectes franco-provençaux, entités linguistiques dites « mineures », au sein d’un groupe linguistique dit « majeur », le dialecte foggiano et l’Italien (se référer à la carte ci-dessous).



Pour poursuivre sur cette dynamique théorique, lancée par Bonatti, cette piste «provençale» nous paraît de loin la plus intéressante, nous pensons que l’attribut corso est une forme dérivée du mot provençal
cortz qui désigne une cour, dérivé lui-même du grec chórtos qui lui nous vient du mot hórtus dans le sens de lieu entouré (murs, arbres, barrières, etc.), qui a comme racine grecque les mots car ou gar qui signifie prendre, saisir en encerclant ou en entourant. Voila une étymologie qui colle bien à la peau ou devrions nous dire au poil de notre cane corso (chien de cour) ou plutôt can cortz (can = chien et cortz = cour) pour les provençaux. Cette hypothèse expliquerait l’orthographe de cane corzo dans de nombreux ouvrages anciens.



Il est tout à fait remarquable, voire même extraordinaire, que cette appellation de can'
corz' (en dialecte), issue d’un dialecte franco-provençal très peu parlé en définitif, ait survécu, à tant de siècles, nous pensons que cette conservation est liée à certains facteurs propres à cette régions des Pouilles, comme l’isolement géographique (région enclavée, très peu de routes pendant très longtemps etc.), mais aussi du fait que « l’unité italienne » soit un phénomène relativement récent 1870.C’est à partir de 1930, que « l’italien standard » commença à être pratiqué par cette population apulienne, le scientifique Dieter Kattenbusch parle de « triglossie », dans son étude Das Frankoprovenzalische un Süditalien, Tübingen, 1982 : composée d’un dialecte communal, un autre régional et d’une langue nationale. La langue standard s’infiltre lentement dans cette population, en débutant dans les années 1920, avec l’avènement du fascisme et des moyens de communications de masse comme la radio. Nous pensons que le service militaire et les deux guerres mondiales aient eu un rôle déterminant dans l’extinction de certains dialectes et de l’utilisation de certains mots comme cane corz par exemple.



J’entends encore ma grand–mère maternelle «La Nonn’ Francesc’» me parler l’Andresen’ (dialecte d’Andria, ma ville natale), plaçant quelques mots français dans une conversation, comme bouquè’ de fiéour’ (bouquet de fleurs) ou damugian' (dame-jeanne), brelloch’ (breloque) etc., qui enfant m’amusait beaucoup.



Dans le Mezzogiorno
cortz devient au fil du temps corz puis cors, qui traduit en italien donne naissance aux appellations canines de cane corzo et cane corso. Corz' ou cors' pour quelques dialectes des Pouilles, signifie encore « robuste », mot surtout utilisé par les anciens (personnes âgées de plus de 80 ans). Une fonction précise et certaines caractéristiques morphologiques de l'individu en ont toujours déterminé une attribution sans aucun doute possible de « robuste ». Nous avons pu référencer dans de très nombreuses ouvrages écrient en dialecte napolitain, cette appellation de cane corzo, dont la plus ancienne est l’Opere, Giulio Cesare Cortese, 1783 p. 124.



De même que la précédente théorie, celle du professeur Giuseppe Chiecchi, fait dériver l’attribut corso du grec ancien
kàrtos, qui indiquait la cour, la clôture et dont dériva même le susmentionné cohors. Cette hypothèse est aussi intéressante, car elle nous transporte directement dans les anciennes colonies italiques grecques qu’étaient les Pouilles du 19ème siècle av. J.C. au 3ème siècle. Soit plus de 2200 ans, de Magna Grecia (Grande Grèce : nom donné à la Grèce de cette époque, car géographiquement plus étendue de part ses colonies italiennes par exemple). Cette empreinte grecque a marqué à jamais cette région des Pouilles, puisqu’une enclave hellénophone y est toujours vivante, composée de neuf communes appelée Grecia Salentina, elle est située à une quinzaine de kilomètres au sud de la ville de Lecce, située presque à l’extrémité du talon de la botte italienne. Ces habitants parlent encore un dialecte grec, plus connu sous le nom de griko ou encore grecanico.



Cohors en latin, assume aussi la même signification de garde du corps quelques exemples d’utilisation :

cohors praetoria : garde du corps du général ;

cohors regia : garde du corps du roi ;

cohors scortorum : protecteur, escorte.

En supposant que pour de semblables métiers on demandait de la prestance, des muscles et de l'hardiesse, nous trouvons que corso nous indique bien un chien de garde et de défense «robuste».



À ces suppositions étymologique nous en ajoutons une autre celle de Gentili parue dans le magazine italien
Nostri Cani (2/79). En rappelant Columelle dans son oeuvre De Re Rustica, Gentili nous fait remarquer que le chien gardien était appelé chien de cour, cour nous indique, comme étymologie, un lieu fermé, une enceinte : cohors, chors, cors.



Un ancien proverbe de la région Capitanata était donné aux membres de la famille d’une future épouse qui demandaient des références sur « le prétendant », la famille de ce dernier répondait avec beaucoup de simplicité : « è nu corz' ! » s’est un corso !

C’était bien plus qu'un long discours. Il voulait, sans autres mots, signifier que chez ce jeune homme étaient réunies toutes les vertus morales et physiques des hommes et en particulier celles du «mâle», volontaire, prestant, robuste et… mais surtout viril.

C’est à se demander si dans ce cas, ce ne sont pas les qualités de l’homme qui décrivent le chien ou bien celles du chien qui d’écrivent les qualités de l’homme… ?



L'anglais
coarse, disait encore Bonatti, porte au mot cors (brut) d'origine celte, encore utilisé au Pays de Galles.



Nous verrons plus loin dans d’autres chapitres l’utilisation de l’attribut chien de cours ou de basse-cours, qualificatif commun en Europe au 19
ème siècle pour définir une certaine catégorie de chiens, car on ne parlait pas encore réellement de races bien établie et catégorisée comme aujourd’hui.



D’autres appellations ont aussi été précisément (géographiquement parlant) relevées par notre bien-aimé professeur Bonatti comme celles relevées dans une bande délimitée à l’ouest par l’Apennin lucanien et à l’est par le plateau de l’Alta Murgia, s'employait :
can'huzz, cane guzzo, pour l’extension phonétique, toujours avec cette signification de robuste, fort. Et, pour finir, dans la haute Lucanie, la zone d’Irpina au sud-ouest de Foggia : cursicu, corsico, cane corsicano, chien robuste, fort. Toutefois, Bonatti ne se sentait pas pleinement satisfait des explications auxquelles il était parvenu et s’acharnait dans de successives recherches jusqu'à inhaler de la poussière datant du 15ème siècle, posée sur des feuilles jaunies et fripées de l’ouvrage Fondi, feudi e masserie di zone pugliesi trouvées aux archives d'État de la ville de Naples, la fascinante appellation de «dogo Pugliese» (dogue des Pouilles).Avec quelques incertitudes d’avoir identifié la solution optimale du nom de la race, il s’orienta vers l’U.C.I. (Union Cynophile Italienne) en 1975, pour la reconnaissance nationale et en 1976 pour celle internationale. Dogo, aurait pu être utilisé par des personnes ayant un «raffinement linguistique» propre aux nobles, aux propriétaires terriens, aux religieux ou encore autres bourgeois, pour qui les cani corsi du passé, étaient mis à la garde de leurs somptueuses demeures ou bien de leurs couvents. Ils étaient souvent importés des fermes apuliennes avec lesquelles subsistaient d’actifs échanges commerciaux notamment pour des divers produits céréaliers, ou le bétail avec des fermes Jésuites autour desquelles se sont développées de nombreuses villes dans une zone allant de la ville de Melfi au Castel del Monte dans le sens de la largeur entre Capitanata et les Pré-Murgie dans le sens de la longueur.

Les feudi étaient des systèmes féodaux basés sur le droit romain, où les comtes, ducs, barons etc. ainsi que les propriétaires des latifundi (vastes propriétés agraires) se substituaient localement au roi et exerçaient les mêmes droits que lui dans leurs seigneuries et peut-être même plus encore. Sur ce sujet j’ai toujours entendu mon père me parler de «
Ius primae noctis» en évoquant la monarchie établie dans notre ville. Qui n’est autre qu’un droit de cuissage, en vertu duquel le duc s’autorisait, à passer la première nuit de noces avec la femme d’un pauvre serf lorsqu’ils se mariaient, ce droit prit fin qu’au 19ème siècle, mais accentua à jamais l’amertume qu’ont les pauvres habitants de ma ville et du Mezzogiorno en général, toute forme d’« Autorité ».



Toujours avec le même respect pour ce grand scientifique, nous annotons que cela fit l’objet de nombreuses discussions houleuses ainsi que de vives oppositions, notamment de la part du bien veillant Pr Casolino, sudiste dans l’âme et de naissance. Malgré toutes ces péripéties ce fut en toute simplicité l’appellation cane corso qui remporta ce long duel, grâce/pour la très large diffusion, jalousement conservé dans le Mezzogiorno, ainsi qu’en Sicile.



Parlons maintenant d’une éventuelle origine Corse sur l’appellation de notre race, aussi belle soit l’Ile de Beauté, disons le simplement, rapidement et clairement, la seule chose commune que la Corse ait avec cette race, c’est le caractère bien trempé, voire même corsé de ses habitants.

D’ailleurs le seul et l’unique lien que nous ayons trouvé lors de nos fastidieuses recherches sur cette quête étymologique, entre cette race et la Corse, c’est le surnom donné au cardinal Domenico Savelli né à Speloncato en 1772, nommé cardinal en 1853, il fut successivement Ministre de la Police, responsable au Conseil d’Etat pour les Finances, et surnommé par le peuple «il cane corso», pour son autorité, et sa défense énergique du pouvoir temporel du Pape comme

dans
Cardinali defunti, La Gerarchia Cattolica e la Famiglia Pontificia per l'anno 1876. Roma : Tipografia dei Fratelli Monaldi, 1875, pp. 124-125. Nous pensons qu’il est inutile de rappeler que la Corse appartint pendant de très longues années au royaume de Gènes et fut déclarée territoire Français qu’en 1789, toutefois la langue italienne subsista comme langue principale jusqu’en 1858, pourtant le dialecte corse (dérivé d’italien) y est toujours pratiqué.



Soyons moins précis et surtout encore plus chauvin, en admettant que l’attribut corso ait une origine «francophone», l’adjectif corso pourrait peut-être lui-même dériver de l’adjectif commun français corsé. Définition de l’adjectif corsé, exemple prit dans un dictionnaire
LAROUSSE : qui a du corps, de la consistance, de la force… cet adjectif s’applique aussi bien sur le physique, que sur le caractère, nous trouvons que cet adjectif est aussi merveilleusement bien porté par notre cane corso ou devrions nous dire par notre «chien corsé».Corsé dériverait lui-même de courser qui au 15ème siècle, voulait dire qui lutte en saisissant à bras le corps cette expression se rencontrait sous la forme « à bon braz le corps ». Le corps représentant le torse, c'est surtout dans la lutte que l'on employait ce terme pour figurer qu'un des combattants attrapait son rival par le torse, donc entièrement. On trouve également dans cette formulation une certaine idée de volonté et de détermination. C'est pourquoi on l'utilise de nos jours pour représenter, qu'une personne fait face à un ennemi ou à des difficultés, qu'elle ne les évite pas.



Nous avons également pu relever une autre appellation commune à plusieurs ouvrages italiens datant du milieu du 19ème siècle comme dans
Vocabulario domestico genovese-italiano con’un appendice zoologica, Prof. Angelo Paganini, 1857 p.235, celle de …cane da corsa définition: chien robuste apte à la chasse au gros gibier, capable de pister et de saisir une proie même seul, comme l’alan, le mâtin ou le dogue. … Appellation plus répandue aux dialectes des régions l’Italie du nord. Cette appellation reprend cette même sémantique liée à la course et à la prise.

Précisons que jusqu’à la fin des années 60, les cani corsi étaient considérés comme une sous-espèce utilitaire de leur célèbre cousin le mâtin napolitain, prenons en exemple un projet de standard soumis à l’E.N.C.I., établit lors d’une assemblée de la société des amateurs du mâtin napolitain daté du 28 février 1968 (ci-dessous), nous pouvons y lire MASTINO NAPOLETANO en principal titre et en sous-titre un peu comme toujours pour garder cette même idée de sous-espèce entre guillemets cane corso et cane da presa. Faute de preuves scientifiques et historiques ou simple méconnaissance cynophile, à cette époque la race mâtin napolitain englobait tout chien italien, de taille moyenne à grande et le plus important étant doguiforme. Lors des chapitres suivants nous nous efforcerons de démontrer leurs origines communes à travers leurs ancêtres antiques les truculents molosses italiques.

Le cane corso était aussi vulgairement et populairement nommé dans toute l'Italie, cagnaccio, ou cagnacc' (le gros chien) particulièrement pour les dialectes des Pouilles. Dans le Dizionario parmigiano-italiano, Ilario Peschieri, 1836, p.180, nous retrouvons cette définition de gros chien, fier, gaillard, cruel…Terme populaire et commun, évoqué en groupant : can' còrs, mastino, dogo, veltro ou alano (cane corso, mâtin, dogue, vautre ou alan).



Il est bon en ce début d’ouvrage de relever qu’à la région des Pouilles doit être reconnue le plus grand mérite, pour sa plus authentique conservation, sur les plans typologique et numérique, de cette race jusqu’à ce jour.



Nous concluons ce chapitre en ayant conscience de ne pas avoir résolu l'énigme, mais nous sommes néanmoins simplement content de se référer humblement aux ‘’Pères’’ de cette fabuleuse race et ainsi d’avoir pu argumenter/appuyer des théories toutes plus fascinantes les une que les autres avec de nouveaux éléments. Mais une chose reste certaine, il était cane corso et le restera. Il le restera pour consolider la tradition de cette belle région, il le restera pour l'orgueil qu’ont pour leurs auxiliaires ces populations rurales du Mezzogiorno, en espérant ne pas en faire pâtir l’étymologie et la philologie originelle de cette appellation populaire de «CANE CORSO».





Auteur Giuseppe GIORGIO